L’argile c’est un souvenir d’enfance, un plaisir inassouvi : deux ou trois occasions d’y mettre les mains, mais je n’ai pas su alors dire mon attrait pour cette matière.

L’argile, c’est aussi le lien à la Terre et mon attention toute particulière pour la nature. Pas une sortie en campagne, en montagne, en forêt sans que mon regard ne se porte sur ces détails, ces éléments naturels, ces bouts de monde qui nous entourent et nous composent : le fin dessin d’une feuille, la courbe d’un bout de bois sec, le reflet d’une roche… Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours eu du plaisir à créer, avec tous les matériaux rencontrés : tissus, bois, papier, graines, laine, mousses,végétaux divers… Mes réalisations sont presque toujours empreintes de nature, qu’elles soient utilitaires ou non. J’aime aussi croiser, associer les matériaux.

Mais la vie va trop vite. Les études, le travail (animation, travail social), les enfants… qui grandissent, et le temps s’entrouvre alors pour laisser place à penser des choses pour soi.

Alors, la terre, l’argile s’impose à moi. En 2005, à la Croix-Rousse, dans un atelier loisir de poterie que je fréquente toujours, je trouve réponse à ce besoin, tant pour mon désir de création que dans les liens humains qui s’y nouent. Progressivement naît l’idée, l’envie d’aller plus loin. En 2018, un bilan de compétence me confirme dans le projet d’en faire mon activité principale. En 2019-20, je suis une année de formation céramique à Matière Contact à Lyon et différents stages (terre papier, modelage de têtes, raku). En parallèle, je commence à soutenir l’animatrice des Ateliers de la Fenotte pour certains stages enfants ou adolescents.

L’animatrice de l’atelier de la Fenotte devrait prendre sa retraite très prochainement. Il nous semble impossible de laisser fermer ce lieu important dans le quartier sans lui donner une continuité. Bien repéré dans le quartier, il permet le croisement des générations autour de la poterie et de la vannerie dans une ambiance chaleureuse, permettant la création de liens forts et durables. Je cherche donc la manière de faire perdurer un lieu similaire sur la Croix-Rousse : un espace d’activités, d’expression, de co-création, de développement de ses capacités, de conquête de l’estime de soi, de détente, de partage… c’est tout cela à la fois.

En parallèle, je souhaite m’impliquer dans des projets de lieux partagés pour connecter entre elles différentes activités artistiques et artisanales. Fédérer ces activités permettrait de soutenir des artistes ou artisans débutants (ou non) pour qui la question du lieu de travail est un obstacle, d’enrichir la pratique de chacun et le développement des idées par ce croisement, de lutter contre l’isolement professionnel en permettant rencontres et échanges, de faire-savoir les savoirs-faire… Il me paraît important que cet espace soit ouvert sur son environnement, permettant l’accueil de publics pour maintenir une vie de quartier, organisant des activités participatives, des événements, des expositions… Ce sont les objectifs que s’est fixé l’association Coléop-terre et qui se propose de mettre en place un modèle économique adapté.

Le désir de la forme qui prend vie dans nos mains, l’engagement du corps, de l’attention, de l’esprit …

La magie, la surprise, l’attente impatiente des transformations par le feu, le besoin d’apprendre de l’argile encore et encore…

Les rencontres autour de ces découvertes, ces plaisirs partagés, les échanges et les liens qui en naissent…